Share deals vs. asset deals dans le secteur de l'immobilier : le contribuable gagne aussi en appel

Dans un Eubelius Flash antérieur, vous pouviez déjà lire que l'administration fiscale avait perdu en première instance un certain nombre d'importants test cases dans le secteur immobilier. Le 12 février 2019, la cour d'appel d'Anvers a rendu deux arrêts importants, par lesquels la position du contribuable est confirmée.

Ces test cases concernent une vingtaine de dossiers dans lesquels les autorités fiscales ont considéré la vente d'actions de sociétés immobilières (généralement des special purpose vehicles) comme un abus, voire une fraude, tant en matière d'impôt des sociétés qu'en matière de TVA. En conséquence, les actionnaires qui vendaient à des investisseurs indépendants leurs actions dans les sociétés immobilières concernées étaient imposées soit sur les plus-values réalisées (qui couvriraient les frais de développement du projet) soit sur la valeur totale de l'immeuble sous-jacent (car l'immeuble sous-jacent aurait en réalité été vendu). De plus, des sanctions de 200% avaient été appliquées dans les deux impôts.  

Entre juin 2017 et janvier 2019, les tribunaux de première instance d'Anvers et de Bruxelles avaient déjà pris dix décisions importantes dans les affaires dans lesquelles Eubelius a assisté les actionnaires vendeurs. La cour d'appel d'Anvers a maintenant rendu des arrêts notables dans deux de ces affaires. A notre connaissance, c'est la première fois qu'une cour d'appel belge se prononce sur un prétendu abus en TVA concernant la vente d'actions d'une société immobilière. Ces test cases sont donc d'une importance capitale pour le secteur immobilier, où la vente d'actions de sociétés immobilières est une pratique courante.

Ces arrêts de la cour d'Anvers concernent des affaires dans lesquelles l'administration fiscale a considéré la vente des actions d'une société immobilière comme un abus en TVA. Plus précisément, les autorités fiscales ont tenté de considérer la plus-value réalisée par les actionnaires sur la vente des actions des sociétés immobilières concernées comme une rémunération pour les services de développement de projets, puis de faire valoir que la TVA relative à ce prétendu développement de projets n'avait pas été déclarée par les actionnaires-promoteurs concernés.

Après une analyse approfondie des faits et des contrats sous-jacents, la cour anversoise confirme les jugements du tribunal de première instance. La cour est donc d'accord avec la défense des actionnaires vendeurs qu'il s'agit effectivement de transactions normales appuyées par des considérations commerciales. La Cour note, entre autres, que la construction utilisée n'avait pas pour objectif principal d'échapper à la TVA, en partie parce qu'elle était dictée par des exigences spécifiques issues des contreparties indépendantes impliquées dans le projet immobilier. En outre, la cour d'appel a conclu qu'il n'était pas question d'une structure purement artificielle puisque la société immobilière avait effectivement développé des activités (notamment en concluant les contrats pertinents en son nom propre et pour son propre compte, en demandant des permis et en acquérant des droits réels sur les terrains). Selon la cour, les autorités fiscales n'ont pas été en mesure de prouver que la société ne supportait aucun risque. A cet égard, la cour note également de manière pertinente : « En outre, une société de projet en promotion immobilière est une pratique courante en vue de faciliter et de rationaliser la demande de permis, de coordonner les plans et les travaux de construction, de regrouper les risques et les responsabilités, etc. L'acquisition d'un bien immobilier par le transfert d'actions est également une transaction habituelle et économiquement normale dans ce contexte. » La cour conclut que les autorités fiscales ne prouvent en l'espèce pas qu'il y a eu abus, intention frauduleuse, intention de nuire ou simulation.

Bien que les demandes des autorités fiscales soient désormais également rejetées en appel, ces affaires illustrent à quel point l'administration fiscale examine de manière critique et précise la conception, la préparation et l'exécution des projets de promotion immobilière. Reste maintenant à savoir si les autorités fiscales persévéreront ou si elles jetteront l'éponge dans les autres test cases encore pendantes devant les cours et tribunaux.

En tout état de cause, il est important d'être prudent lors de la structuration et de la mise en œuvre de projets immobiliers. Les entreprises actives dans le secteur immobilier doivent d'abord s'assurer que tous les documents relatifs à leurs projets immobiliers soient soigneusement préparés et ceci à chaque étape du projet tels que dans la préparation et la soumission d'offres dans le cadre d'appels d'offres publics, des négociations avec des investisseurs du secteur privé, des phases de négociation précontractuelle et contractuelle, de la rédaction, entre autres, de déclarations de principe et/ou d'intention, d'accords de financement, de SPA et/ou de contrats d'option, de contrats de développement et de construction de projets ainsi que de contrats d'entreprise et de sous-traitance, ainsi que des différentes phases d'exécution du projet et des flux de trésorerie qui y sont associés. En outre, les entreprises doivent s'assurer que les actions qu'elles entreprennent sont cohérentes et conformes à la documentation établie.

Grâce à sa vaste expérience en la matière, y inclus dans la défense des intérêts des contribuables devant les cours et tribunaux, Eubelius a pu développer une expertise particulière dans ce domaine. C'est pourquoi nous sommes à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.