Le décret flamand relatif au "permis unique" résiste au test de la Cour constitutionnelle

Spotlight
15 décembre 2016

Dans un arrêt du 6 octobre 2016, la Cour constitutionnelle s'est prononcée sur trois recours en annulation introduits contre le décret flamand relatif au "permis unique" ("omgevingsvergunning"). La Cour constitutionnelle n'a finalement annulé qu'un seul article de ce large décret. Les principales nouveautés du décret ont résisté au test constitutionnel. Un obstacle important a donc été franchi pour l'entrée en vigueur du décret relatif au permis unique prévue le 23 février 2017. Un certain nombre de modifications de ce décret qui auront un impact se préparent également.

Le décret relatif au permis unique vise à créer un décret-cadre pour la mise en place d'une procédure de délivrance de permis intégrée dans laquelle aussi bien les aspects urbanistiques qu'environnementaux sont pris en compte. Antérieurement, nous avons discuté des lignes directrices de ce décret, qui rentrera en vigueur le 23 février 2017.

Les principes importants du permis unique sont maintenus

Un certain nombre d'associations environnementalistes et de particuliers se sont tournés vers la Cour constitutionnelle pour s'opposer au nouveau décret flamand relatif au permis unique. Ils contestaient plusieurs aspects principaux du décret, parmi lesquels:

  • le caractère permanent du permis unique;
  • l'avis implicite positif dans le cadre de la délivrance de permis;
  • les modalités du droit à être entendu en première et dernière instance administrative;
  • la possibilité de rejet implicite du recours administratif; et
  • l'obligation de réaliser un rapport sur les incidences environnementales d’un projet (dans le cas d'un renouvellement d'un permis unique d'une durée déterminée et de la conversion d'un permis d'environnement-ancien régime ("milieuvergunning").

La Cour constitutionnelle a intégralement rejeté les critiques des parties requérantes sur ces points. Les grands principes du décret relatif au permis unique sont donc maintenus.

La Cour a jugé que le caractère permanent du permis unique était conforme au principe de standstill parce que le caractère permanent n'est pas inconditionnel. La Cour constitutionnelle a en effet constaté que le législateur décrétal a prévu des "mesures d'accompagnement", telles que l'évaluation générale et ciblée des établissements ou des activités et la possibilité pour le public concerné ou pour les instances consultatives de participer – lisez, d'avoir le droit d'émettre un avis – à la fin de chaque délai d'exploitation de 20 ans. Ces garanties spécifiques garantissent selon la Cour constitutionnelle qu'aucun recul significatif dans le niveau de protection de l'environnement ne sera à déplorer.

Nécessité d'une évaluation appropriée dans le cas d'un renouvellement d'un permis unique d'une durée déterminée et de la conversion d'un permis d'environnement-ancien régime

La Cour constitutionnelle s'opposa seulement à une partie très spécifique du décret relatif au permis unique (article 36ter §3, al. 3 du décret flamand concernant la conservation de la nature et le milieu naturel, comme inséré par l'article 226 du décret flamand relatif au permis unique). La disposition contestée prévoyait que, pour le simple renouvellement d'un permis unique ou pour la conversion d'un permis d'environnement-ancien régime existant, délivré après le 10 septembre 2002, en principe aucune évaluation appropriée ne devait être réalisée, à moins que ce simple renouvellement ou cette conversion ait trait à des activités qui requièrent des interventions physiques dans l'environnement.

Selon la Cour constitutionnelle, l'article 226 du décret relatif au permis unique viole le droit de l'Union européenne, plus spécifiquement l'article 6 de la "Directive Habitats". A la suite d'un arrêt récent de la Cour de justice de l'Union européenne du 14 janvier 2016, la Cour constitutionnelle a décidé que les exigences de la Directive Habitats ne sont pas rencontrées quand une évaluation appropriée ne doit avoir lieu que lorsque le permis a trait à des activités qui requièrent des interventions physiques dans l'environnement. Une évaluation appropriée est aussi nécessaire, selon la Cour, lors du renouvellement d'un permis unique (ou d'une partie de celui-ci), quand le projet en question (isolément ou en combinaison avec d'autres plans ou projets) peut avoir des conséquences significatives sur une zone spéciale de conservation.

La Cour constitutionnelle a remarqué, spécifiquement par rapport avec la conversion d'un permis d'environnement-ancien régime existant en un permis unique, qu'il n'était pas raisonnablement justifié de prendre la date du 10 septembre 2002 comme la date à partir de laquelle un permis d'environnement-ancien régime devait être considéré comme étant délivré pour une durée indéterminée, sans qu'une actualisation de l'obligation d'une évaluation appropriée ne soit prévue d'aucune manière. Il devra donc également être vérifié, lors de la conversion d'un permis d'environnement-ancien régime qui a été délivrée après le 10 septembre 2002, si une actualisation de l'obligation d'évaluation appropriée est nécessaire.

Notons que le point de vue de la Cour constitutionnelle concerne uniquement l'obligation de réalisation d'une évaluation appropriée. En ce qui concerne l'obligation de réaliser un rapport sur les incidences environnementales d’un projet, la Cour constitutionnelle a clairement jugé qu'un simple renouvellement d'un permis unique ou la conversion d'un permis d'environnement-ancien régime en un permis unique ne tombent pas sous l'obligation de réaliser une évaluation des incidences sur l'environnement.

Modifications du décret relatif au permis unique

L'arrêt de la Cour constitutionnelle n'aura donc pas d'impact sur la date d'entrée en vigueur du décret flamand relatif au permis unique. Cette entrée en vigueur aura toujours lieu le 23 février 2017.

Par contre, il semble que le décret relatif au permis unique sera encore soumis à quelques modifications. Un avant-projet de décret, sur lequel l'avis du Conseil d'Etat est actuellement attendu, vise en effet à mettre en œuvre quelques modifications avant l'entrée en vigueur du décret.

Une modification importante concerne la disposition sur le délai d'échéance des décisions d'autorisation d'un permis en première et dernière instance administrative, alors même que cette disposition avait résisté au test de la Cour constitutionnelle. Ce système remplacera en effet le rejet implicite d'un recours administratif, tel qu'il était prévu initialement dans le décret relatif au permis unique.

Le législateur décrétal a décidé de prévoir des sanctions financières lorsque l'autorité délivrante dépasse le délai d'échéance pour la prise de décisions d'autorisation d'un permis en première et dernière instance administrative.

Si le collège des bourgmestre et échevins, ou la députation en première instance administrative, ne décident pas sur la demande de permis endéans le délai d'échéance, le demandeur peut demander une indemnisation unique de 2.500 ou de 5.000 euros (en fonction de si la demande est traitée via la procédure simplifiée ou via la procédure normale).

Si la députation en dernière instance administrative, ou le fonctionnaire environnemental régional ou le Gouvernement flamand en première ou dernière instance administrative, ne décident pas endéans le délai d'expiration, ils seront redevables d'une astreinte de 500 euros par jour au demandeur de permis ou à la personne ayant introduit un recours.

Cette disposition a un impact considérable sur la situation du demandeur de permis. Il doit en effet demander cette astreinte à l'autorité compétente endéans un délai de 90 jours après l'expiration du délai. S'il ne le fait pas, il est considéré comme ayant renoncé à sa demande ou à son recours et à son droit d'astreinte! Les demandeurs de permis prendront soin de garder le délai d'expiration à l'œil et au besoin, de requérir les astreintes dans le délai imparti, s'ils veulent encore avoir une chance d'obtenir une décision liée au permis.